Elisabeth Samain, une élue engagée contre l’errance diagnostique
Elue référente de la Fondation Groupama depuis 2015, Elisabeth Samain nous parle de son expérience de parent d'enfant en errance diagnostique et de son engagement pour sensibiliser le plus grand nombre aux maladies rares.
Pourquoi vous être engagée en tant qu’élue Groupama ?
Je suis issue d’une famille nombreuse, nous étions neuf à la maison. Mon père était agriculteur, et ma mère avocate et assistance sociale. La valeur la plus importante à leurs yeux était la famille, j’ai donc été baignée dans cet esprit familial de solidarité et d’amour. Mon père était assuré Groupama et président de caisse locale. Après des études sociales, j’ai épousé un agriculteur en 1978 et je l’ai rejoint dans son petit village de Labourgade. Je connais donc bien le monde agricole et rural. Par ailleurs, je me suis toujours engagée auprès d’associations, comme le Secours catholique. J’ai contribué à l’organisation de forums thématiques entre plusieurs associations à Castelsarrasin (bien se nourrir, bouger, violences, addictions…). Nous avons mutualisé nos compétences, appris à nous connaitre et à travailler ensemble, avec toutes nos différences et spécificités.
En 1982, je suis devenue secrétaire mandataire Groupama. Cela m’a permis de m’intégrer dans le village. J’ai pu créer du lien et une grande confiance avec les sociétaires. Le temps est passé vite. J’ai arrêté d’être secrétaire mandataire en 2001, étant trop prise par l’exploitation. En 2008, je suis entrée au conseil de la Fédération départementale du Tarn-et-Garonne. J’y suis restée pendant 13 ans et en ai été Vice-Présidente les dernières années.
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Les balades solidaires du Tarn et Garonne
Avant de rejoindre la Fondation Groupama, connaissiez-vous déjà les maladies rares ?
Nous avons eu trois filles, dont la seconde est handicapée mentale. Lorsqu’Aurélie est née, en 1981, il n’y avait pas toutes les ressources qu’Internet offre aujourd’hui. Le médecin de famille ne savait pas ce qu’elle avait, tout le monde était démuni, seul. On est allé voir plusieurs professionnels de santé qui ne savaient pas ce qu’elle avait. Certains n’acceptaient pas de ne pas savoir. Il fallait absolument qu’ils lui donnent « une étiquette » ! Nous sentions bien qu’elle avait plusieurs problèmes – besoin d’orthophonie, psychomotricité – mais on nous avait interdit de suivre cette voie.
Alors nous avons appris à avancer à petit pas, en désobéissant si besoin, en écoutant notre cœur, notre ressenti, notre intuition. Nous avons dû faire face à beaucoup de rigidités et d’abus de pouvoir de la part de certains professionnels. C’est un message que je veux donner aux parents : il faut oser faire les choses. Et ce n’est pas parce qu’une » masse » dit quelque chose qu’elle a raison.
Aujourd’hui nous savons que nous avons eu raison. Il y a un message qui me tient à cœur : il est important d’aider les parents à avoir confiance en leur connaissance de leur enfant, de les soutenir et les aider. Et surtout de ne pas les culpabiliser.
Ce que j’ai appris avec Aurélie : c’est l’humilité, surtout beaucoup de tolérance et d’admiration aussi. A force de se battre, Aurélie a su avancer, trouver sa place et apprécier la vie, tout simplement, comme chacun d’entre nous. Vivre avec une personne qui a un handicap, ça vous fait grandir et ça remet les pendules à l’heure!
Nous savons aujourd’hui qu’Aurélie est atteinte d’une maladie rare, la microdélétion du chromosome 1, tellement rare qu’elle n’a même de nom. L’errance diagnostique aura duré vingt ans.
Aurélie était alors dans un centre relevant de l’Adapei. Avec d’autres bénévoles, nous avons mis en place des rencontres avec les familles dont les enfants n’étaient pas encore dans des centres, pour les épauler, les écouter. Par ailleurs, avec l’aide d’une psychologue, on a créé des ateliers sur une journée pour accueillir des adultes handicapés qui n’avaient pas de place dans des centres pour permettre à leurs familles de souffler. Le matin, après un temps d’accueil afin que chacun trouve sa place et son souffle, nous cuisinions avec eux un repas complet que nous dégustions ensemble. L’après-midi était davantage axée sur des activités artistiques ou de sorties.
Cette expérience m’a permis d’utiliser les compétences en économie sociale et familiale du métier que je n’ai pas pu exercer. Mais elle m’a surtout permis de faire de très belles rencontres, de voir leurs progrès, leurs joies et constater un soulagement des familles.
Au niveau de la Fédération Groupama, depuis la crise sanitaire, nous avons soutenu plusieurs projets d’associations dans le monde du handicap. Je m’en réjouis car il a beaucoup souffert et il a grandement besoin que chacun soit sensibilisé à cet univers-là.
Pourquoi avoir rejoint la Fondation Groupama ?
Lorsqu’en 2015 la Fondation a pris beaucoup plus d’ampleur en Occitanie, avec le début des Balades solidaires, le Président de Fédération du Tarn-et-Garonne a pensé à moi. Rejoindre la Fondation Groupama m’a permis de concilier mon engagement mutualiste et mon combat pour faire connaître et reconnaître les maladies rares, pour aider les familles concrètement, sur le terrain. C’est un domaine en manque terrible d’informations, avec gros besoin de reconnaissance, et surtout de financement pour les projets. Je suis très fière de faire partie de la Fondation. Ensemble, nous formons une force collective, et nous mobilisons nos énergies pour éclairer la vie de chacun.
Ce qui m’a plu dans la Fondation, c’était la mission de sensibilisation d’un plus large public aux maladies rares. Face à l’errance diagnostique, je me suis tellement sentie seule. C’est Aurélie qui m’a poussé à m’impliquer pour sensibiliser le grand public.
Pour moi, le plus important est de croire en la personne. Par exemple, lorsqu’un programme éducatif a pour but que la personne » ne perde pas les acquis « , je me demande toujours » pourquoi ne pourrait-elle pas en gagner aussi ? « . Tolérance, respect, bienveillance et humilité sont les valeurs primordiales. Et surtout, ne pas se poser la question fameuse » pourquoi ? » Elle est sans réponse…
Si vous deviez citer une Balade en particulier ?
L’un des avantages des Balades dans notre département, c’est que ce sont les caisses locales différentes qui les organisent chaque année. Cela permet d’impliquer beaucoup de bénévoles, de toucher davantage de monde sur l’ensemble du département et de soutenir plusieurs associations au fil des ans : Prader Willi, San Filippo, ARSLA, ADAAT Alpha 1…
Par exemple, en 2022, nous avons collaboré avec l’association Les Belles Montées, afin de collecter des fonds pour la recherche sur la maladie de Charcot. Cette opération a permis de réunir presque 300 personnes et récolter plus de 10 000€, reversés à l’ARSLA.
On soutient également des initiatives individuelles, comme celle de Laurence Calais dans son tour de France pour sensibiliser au syndrome de Prader Willi et récolter des fonds pour permettre la pratique de sport adapté.
Si vous deviez parler d’une association en particulier ?
Je prendrai l’exemple de Prader Willi France, que nous avons soutenu pendant 2 balades, ainsi que par une vente de bouteilles de vin, une forme innovante de fundraising. L’association fait un formidable travail pour sensibiliser à cette maladie génétique rare et complexe et aider les familles.